sábado, 16 de agosto de 2014

Pablo Neruda ― Poema 5 // Poème V

Para que tú me oigas
mis palabras
se adelgazan a veces
como las huellas de las gaviotas en las playas.
Collar, cascabel ebrio
para tus manos suaves como las uvas.
Y las miro lejanas mis palabras.
Más que mías son tuyas.
Van trepando en mi viejo dolor como las yedras.
Ellas trepan así por las paredes húmedas.
Eres tú la culpable de este juego sangriento.
Ellas están huyendo de mi guarida oscura.
Todo lo llenas tú, todo lo llenas.
Antes que tú poblaron la soledad que ocupas,
y están acostumbradas más que tú a mi tristeza.
Ahora quiero que digan lo que quiero decirte
para que tú las oigas como quiero que me oigas.
El viento de la angustia aún las suele arrastrar.
Huracanes de sueños aún a veces las tumban
Escuchas otras voces en mi voz dolorida.
Llanto de viejas bocas, sangre de viejas súplicas.
Ámame, compañera. No me abandones. Sígueme.
Sígueme, compañera, en esa ola de angustia.
Pero se van tiñendo con tu amor mis palabras.
Todo lo ocupas tú, todo lo ocupas.
Voy haciendo de todas un collar infinito
para tus blancas manos, suaves como las uvas.

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Poème V

Pour que tu m'entendes mes mots parfois s'amenuisent
comme la trace des mouettes sur la plage.

Collier, grelot ivre
pour le raisin de tes mains douces.

Mes mots je les regarde et je les vois lointains.
Ils sont à toi bien plus qu'à moi.
Sur ma vieille douleur ils grimpent comme un lierre.

Ils grimpent sur les murs humides.
Et de ce jeu sanglant tu es seule coupable.

Ils sont en train de fuir de mon repaire obscur.
Et toi tu emplis tout, par toi tout est empli.

C'est eux qui ont peuplé le vide où tu t'installes,
ma tristesse est à eux plus qu'à toi familière.

Ils diront donc ici ce que je veux te dire,
et entends-les comme je veux que tu m'entendes.

Habituel, un vent angoissé les traîne encore
et parfois l'ouragan des songes les renverse.

Tu entends d'autres voix dans ma voix de douleur.
Pleurs de lèvres anciennes, sang de vieilles suppliques.

Ma compagne, aime-moi. Demeure là. Suis-moi.
Ma compagne, suis-moi, sur la vague d'angoisse.

Pourtant mes mots prennent couleur de ton amour.
Et toi tu emplis tout, par toi tout est empli.

Je fais de tous ces mots un collier infini
pour ta main blanche et douce ainsi que les raisins

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